nouvelObs.com, journal d’actualite en temps reel 04/02/2011

04/02/1118:39

Ski: Jean-Pierre Roy, "Rasta Piquet" au nom d'Haïti

par Lucien Libert et Noémie Olive

ORGERUS, Yvelines (Reuters) - Jean-Pierre Roy est tout à la fois: fondateur et président de la Fédération haïtienne de ski, mais aussi coureur néophyte et qualifié à 47 ans pour les championnats du monde qui débutent la semaine prochaine à Garmisch-Partenkirchen.

Surnommé "Rasta Piquet" par la presse de son pays, ce chef d'une petite d'entreprise d'informatique, né en Haïti mais vivant en France depuis son plus jeune âge, s'est lancé dans un pari fou: arriver en bas de la piste à Garmisch et faire parler de son pays natal.

Il dit que la FIS (la Fédération internationale de ski) a intégré la Fédération haïtienne le 6 novembre, en même temps que celle des Iles Vierges. "Là, je me suis dit 'mon gars, il va falloir y aller'. Depuis, j'ai 20 jours de ski dans les jambes alors que les autres en ont vingt ans, la différence est là", explique-t-il à Reuters en riant.

"Mon objectif, c'est que l'on parle d'Haïti une fois dans le monde, qu'on oublie le choléra, la pauvreté, la misère, c'est de voir Haïti au même niveau que les autres. Dans le portillon, on est tous pareils."

Faute de pistes en région parisienne, Jean-Pierre Roy s'entraîne sur une machine à ski dans sa cour ou dans son garage avec son copain et entraîneur Thierry Montillet, cousin éloigné de Carole, championne olympique de descente en 2002.

Cela permet de travailler le déhanchement et de muscler les cuisses. Essentiel pour disputer le géant et le slalom prévu au programme de "ses" Mondiaux.

"J'AI PEUR"

Il se souvient de son dernier voyage dans son pays natal, en octobre quand la misère lui a "explosé à la figure". De là vient sa décision de se lancer dans l'aventure des Mondiaux de Garmisch. Comme un coup de folie.

"Cela me met énormément de pression. C'est ma passion le ski, mais j'ai peur. Je n'ai pas le niveau, j'ai 47 ans, mais je veux qu'on parle de mon pays. Déjà, la presse là-bas m'a surnommé 'Rasta Piquet' et cela me va très bien", dit-il.

"Il faut que j'arrive en bas. Même si je tombe 10 fois, 15 fois, 20 fois, je me relèverai car il faut que j'arrive en bas avec mes deux skis.

"Finalement, tout cela ce n'est plus moi, j'ai l'impression d'être sur un nuage. Cela me dépasse, ce n'est plus moi, c'est Haïti."

S'il revendique ses origines, ce papa d'une grande fille de 22 ans et d'un garçon de huit ans, également grand-père, reconnaît que son coeur est en France, où il est arrivé en 1965, lorsque ses parents ont fui le régime de François Duvalier, alias "Papa Doc".

"Mon coeur est en France et mes racines sont haïtiennes. J'ai été adopté par la France et tout ce que j'ai pu donner à Haïti, c'est grâce à la France", souligne-t-il.

Soutenu notamment par le Secours populaire, il compte bien faire parler de lui en Allemagne et attirer encore des dons pour Haïti au travers du site internet qu'il a créé avec Thierry Montillet (www.haiti.montillet.fr).

Edité par Gilles Trequesser